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Chapitre 3 Item 124 – UE 5 – Ostéopathies fragilisantes

Objectifs pédagogiques

Nationaux

  • Diagnostiquer une ostéoporose, évaluer le risque fracturaire.

  • Argumenter l’attitude thérapeutique devant une ostéoporose et planifier le suivi du patient.

  • Diagnostiquer une ostéomalacie et connaître les principes du traitement d’une ostéomalacie carentielle.

 

CNEG

  • Connaître la physiologie du vieillissement osseux et la physiopathologie de l’ostéoporose.

L’ostéoporose est une maladie diffuse du squelette, caractérisée par une diminution de la résistance osseuse entraînant un risque accru de fracture. La résistance osseuse est la résultante à la fois de la densité et de la qualité osseuse définies par de nombreux paramètres.


 

I Bases physiologiques du vieillissement osseux

 

L’os est en perpétuel remodelage : sans cesse, il se résorbe et se forme. La résorption osseuse est assurée par des cellules multinucléées dénommées ostéoclastes. D’autres cellules, les ostéoblastes forment le tissu ostéoïde qui se minéralise ensuite sous l’action de la vitamine D. Il existe un équilibre entre résorption osseuse et formation osseuse. Dès que cet équilibre est rompu, soit parce que les ostéoclastes sont hyperactifs, soit du fait d’une déficience ostéoblastique, l’ostéoporose s’installe.
 

A Notion de capital osseux
Le capital osseux de l’adulte, se forme lors de l’adolescence, essentiellement dans la période prépubertaire. Il dépend de :

  • facteurs génétiques ;

  • facteurs nutritionnels et notamment des apports calciques ;

  • facteurs mécaniques et notamment de la pratique de l’activité physique.

Pendant toute la période de croissance, la masse osseuse de l’organisme augmente sous la double influence de l’apposition sous-périostée pour l’os cortical et de l’activité des cartilages de conjugaison pour le secteur spongieux. Puis le squelette entre dans une phase de maturation qui se traduit par un discret épaississement des corticales et une augmentation progressive de la densité minérale. La masse osseuse maximale ou peak bone mass, qui représente la somme des effets de la croissance (90 à 95 %) et de la maturation (5 à 10 %) est atteinte vers l’âge de 35 à 40 ans pour l’os compact, et probablement plus tôt pour l’os spongieux.

Il existe une grande variabilité interindividuelle du capital osseux au début de la vie adulte.

En cas d’ostéoporose, le seuil fracturaire est atteint d’autant plus rapidement que le capital osseux est faible.
 

B Notion de perte osseuse physiologique

Après la période de maturation du tissu osseux, survient une phase de raréfaction progressive qui est observée chez tous les individus. Elle se traduit par un amincissement progressif des corticales et une raréfaction de l’os spongieux. Toutes les pièces du squelette sont concernées. L’âge de début de cette raréfaction se situe vers 40–45 ans chez la femme et 50–60 ans chez l’homme.

La vitesse et l’ampleur de la perte osseuse physiologique ne sont pas les mêmes chez l’homme et chez la femme et ont des valeurs différentes pour l’os compact et l’os spongieux.

Chez l’homme, la raréfaction est progressive et linéaire. L’os cortical se raréfie en moyenne de 0,3 % par an. La perte de l’os spongieux semble plus importante que celle de l’os cortical, à l’origine de 30 % de perte de masse osseuse entre 20 et 80 ans.

Chez la femme, il se produit, pour l’os cortical comme pour l’os spongieux, une accélération de la perte osseuse pendant les 5 à 10 ans qui suivent la ménopause. Cette perte osseuse rapide se traduit par une cassure du profil évolutif de l’ostéopénie physiologique. L’os cortical se raréfie en moyenne de 1 % par an par rapport à la masse osseuse maximale. L’os spongieux se raréfie de façon telle que la femme perd, entre 20 et 80 ans environ, 40 % de sa masse osseuse.

Le mécanisme de cette perte osseuse physiologique fait intervenir deux processus :

  • une perte osseuse rapide : par augmentation d’activité des ostéoclastes ; elle concerne la femme en période post-ménopausique et se traduit par une perforation des travées osseuses et une raréfaction de l’os trabéculaire, et une altération de l’architecture osseuse ;

  • une perte osseuse lente : par diminution d’activité des ostéoblastes ; elle concerne les sujets très âgés, après 75 ans et se traduit par une diminution de l’épaisseur des travées et des corticales osseuses.
     

C Notion de seuil fracturaire

Ces phénomènes combinés altèrent la résistance biomécanique de l’os. Si l’on mesure la masse osseuse de sujets ostéoporotiques présentant au moins une fracture vertébrale, on observe que, quelle que soit l’étiologie de l’ostéoporose et dans les deux sexes, il existe une quantité moyenne de tissu osseux ou une densité minérale à partir de laquelle surviennent les fractures. Cette zone statistiquement établie est appelée le « seuil fracturaire ». Le vieillissement osseux prédispose l’individu et notamment la femme au franchissement de ce seuil et donc à l’apparition de fracture.

II Épidémiologie, étiologies et facteurs de risque de l’ostéoporose

En France, on estime à 130 000 par an le nombre de fractures attribuables à l’ostéoporose dont 50 000 à 60 000 fractures vertébrales, 50 000 fractures du poignet, 50 000 fractures de l’extrémité supérieure du fémur chez les femmes et 14 000 chez les hommes. Le coût global de l’ostéoporose est estimé à plus de 4,5 milliards d’euros par an en France ; le coût lié aux fractures de l’extrémité supérieure du fémur représente plus de la moitié de cette somme.

Les conséquences morbides de l’ostéoporose sont surtout importantes après une fracture de l’extrémité supérieure du fémur avec, dans l’année qui suit :

  • 15–20 % de mortalité ;

  • 20–25 % d’institutionnalisation ;

  • 40–60 % de perte importante d’autonomie, essentiellement motrice.

Les conséquences morbides des fractures vertébrales sont nombreuses : douleurs chroniques, troubles posturaux, réduction de la capacité pulmonaire totale, troubles du transit intestinal. Elles sont plus marquées en cas de fractures vertébrales multiples.

L’ostéoporose est polyfactorielle ; l’âge est en soi un facteur de risque d’ostéoporose. En effet, la densité osseuse diminue physiologiquement à partir de 35 ans dans les deux sexes. Les étiologies les plus fréquentes de l’ostéoporose sont :

  • la carence œstrogénique chez la femme : ménopause essentiellement, d’autant plus qu’elle est précoce et quelle que soit son origine (naturelle ou par ovariectomie) ;

  • l’hyperparathyroïdie : le plus souvent secondaire (parathormone élevée et calcémie normale ou basse) à des apports calciques ou en vitamine D insuffisants (carence alimentaire, exposition solaire insuffisante, insuffisance rénale), plus rarement primitive (calcémie élevée et parathormone normale ou haute).

Les étiologies sont citées dans le tableau 3.1. La frontière entre facteurs de risque et facteurs étiologiques est parfois ténue. Les facteurs de risque d’ostéoporose sont nombreux (tableau 3.2).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

III Diagnostic de l’ostéoporose
 

A Diagnostic positif

Le diagnostic d’ostéoporose repose sur la constatation d’une fracture ostéoporotique et/ou d’une densité osseuse faible. L’origine ostéoporotique d’une fracture est suspectée devant un traumatisme de faible énergie ou « non traumatique », c’est-à-dire dont l’intensité est inférieure ou égale à une chute de sa hauteur ou l’existence de facteurs de risque d’ostéoporose.

En l’absence de fracture périphérique ou vertébrale, le diagnostic d’ostéoporose repose sur l’existence d’une densité osseuse faible mesurée par densitométrie osseuse double énergie à rayons X (dual X-ray absorptiometry [DXA] ou ostéodensitométrie). La densité osseuse doit être mesurée au niveau de l’extrémité supérieure du fémur ; la mesure au niveau du rachis n’est pas conseillée car souvent faussée par l’arthrose vertébrale, très fréquente chez le sujet âgé. Il s’agit d’une méthode juste, précise (1 à 2 %), reproductible (coefficient de variation : 0,5 à 1 %), non irradiante. La densité minérale osseuse (DMO), exprimée en g/cm2, est très prédictive du risque fracturaire ultérieur. Toute diminution de 10 % ou d’une déviation standard de la DMO multiplie par 2 le risque fracturaire.

La DMO peut être exprimée en valeur absolue (grammes par cm2), ou bien en valeur relative (%) ou déviations standards (DS) par rapport à un sujet de même sexe et de même âge (Z-score) ou bien par rapport à un sujet de même sexe et âgé de 25 et 40 ans (T-score). L’ostéoporose ostéodensitométrique est définie à partir des T-scores.

L’ostéoporose est définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) par un T-score ≤ – 2 ,5.

 

 

Il ne faut pas confondre ostéoporose ostéodensitométrique et indication d’un traitement anti-ostéoporotique. En effet, l’indication de débuter un traitement anti-ostéoporotique est basée non seulement sur le T-score mais sur le risque de fracture, dépendant des antécédents de fracture et d’autres facteurs.

 

Il ne faut pas confondre ostéoporose ostéodensitométrique et indication d’un traitement anti-ostéoporotique. En effet, l’indication de débuter un traitement anti-ostéoporotique est basée non seulement sur le T-score mais sur le risque de fracture, dépendant des antécédents de fracture et d’autres facteursAinsi, un traitement est indiqué en cas d’antécédent de fracture sévère (si le T-score est < – 1), en cas de T-score ≤ – 3, ou quand il existe un T-score ≤ – 2 ,5 en présence d’au moins un autre facteur de risque de fracture qu’un antécédent de fracture sévère (fracture non sévère ou présence d’un autre facteur de risque d’ostéoporose ou de fracture listé ci-dessous),

 

 

L’absorptiométrie doit être réalisée dès que l’on évoque l’ostéoporose. L’ostéodensitométrie est remboursée par l’Assurance maladie dans les situations suivantes retenues par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé en 2006 :

 - en population générale :

  • en cas de signes d’ostéoporose :

  • en cas de pathologie ou traitement potentiellement inducteur d’ostéoporose :

  • découverte ou confirmation radiologique d’une fracture vertébrale (déformation du corps vertébral) sans contexte traumatique ni tumoral évident,

  • antécédent personnel de fracture périphérique survenue sans traumatisme majeur (sont exclues de ce cadre les fractures du crâne, des orteils, des doigts et du rachis cervical),

  • lors d’une corticothérapie systémique (de préférence au début) prescrite pour une durée d’au moins 3 mois consécutifs, à une dose > 7,5 mg/j d’équivalent prednisone,

  • antécédent documenté de pathologie ou de traitement inducteur d’ostéoporose : hyperthyroïdie évolutive non traitée, hypercorticisme, hyperparathyroïdie primitive hypogonadisme prolongé (incluant l’androgénoprivation chirurgicale [orchidectomie] ou médicamenteuse [traitement prolongé par un analogue de la Gn-RH]) et ostéogenèse imparfaite ;

- chez les femmes ménopausées : 

  • antécédents de fracture du col fémoral sans traumatisme majeur chez un parent au 1er degré,

  • indice de masse corporelle < 19 kg/m2

  • ménopause avant 40 ans quelle qu’en soit la cause,

  • (> 3 mois) à la dose de corticoïde équivalent prednisone > 7,5 mg par jour

Plus récemment, le groupe de recherche et d’information sur l’ostéoporose (GRIO) (2012) a proposé d’ajouter l’antécédent de chute dans la dernière année, comme facteur devant faire rechercher une ostéoporose ostéodensitométrique, la chute étant un facteur de risque de fracture indépendant de la densité osseuse.


B Diagnostic étiologique et différentiel de l’ostéoporose

La recherche d’une ostéoporose secondaire repose essentiellement sur les données cliniques : études des antécédents et des traitements reçus, examen à la recherche de signes de maladies endocriniennes, rhumatologiques ou digestives.

Le diagnostic différentiel de l’ostéoporose est essentiellement représenté par les atteintes osseuses d’origine cancéreuse, notamment le myélome et les métastases osseuses. Là encore le contexte clinique peut orienter vers ces diagnostics.

L’enquête diagnostique doit être complétée par les dosages biologiques suivants :

  • CRP ;

  • électrophorèse des protides ;

  • calcémie, phosphorémie ;

  • créatininémie et calcul de la clairance de la créatinine.

Le dosage de la vitamine D3 doit être largement réalisé chez les personnes âgées car la carence est très fréquente.

Ce bilan peut être complété par des dosages hormonaux, notamment le dosage de la TSH car l’hyperthyroïdie est cause de perte osseuse.

D’autres examens peuvent être nécessaires en cas d’anomalies de ce premier bilan.

Chez les hommes âgés, l’ostéoropose est moins fréquente que chez les femmes âgées. Toutefois, elle concerne 7 à 8 % des hommes âgés. Chez eux, les ostéoporoses secondaires sont plus fréquentes et concernent environ la moitié des cas. Aussi une recherche attentive est indispensable, en recherchant des signes cliniques et biologiques d’intoxication alcoolique chronique, d’hémochromatose, d’hypogonadisme ou d’hypercorticisme. D’autres maladies sont plus rares : signes de maladies rares déminéralisantes : Lobstein (fractures corticales à l’adolescence, antécédents familiaux), mastocytose (urticaire pigmentée avec signe de Darrier), Ehlers-Danlos, Marfan, lithiases rénales calciques récidivantes par hypercalciurie, intolérance au lactose (nausées, diarrhée après ingestion de lait).

 

IV Traitements de l’ostéoporose

 

Le risque de fracture ostéoporotique est directement corrélé à la diminution de la masse osseuse qui elle-même dépend du capital osseux acquis en fin de croissance et de la quantité de tissu osseux perdue ultérieurement. Le risque de fracture est aussi relié à d’autres facteurs non osseux comme le risque de chute. La prévention de l’ostéoporose et des fractures ostéoporotiques consiste idéalement à optimiser le pic de masse osseuse de fin de croissance et à ralentir ou empêcher la perte osseuse qui survient ultérieurement, sécuriser l’environnement et réduire le risque de chute.

 

A Calcium-vitamine D

Administré isolément, le traitement vitaminocalcique a montré une efficacité pour prévenir les fractures ostéoporotiques chez des sujets âgés vivant en institution ou confinés à domicile. Cette efficacité a été établie avec une dose de calcium d’au moins 1 g/j et une dose de vitamine D d’au moins 800 UI/j. Chez les sujets âgés en institution de fortes doses de vitamine D3 peuvent être prescrites : 100 000 à 200 000 UI tous les 3 mois en solution buvable, par exemple.

Chez les personnes âgées non institutionnalisées, les apports en calcium et vitamine D ne permettent pas de prévenir les fractures. Toutefois, en cas d’ostéoporose, la prescription d’un traitement par calcium (1 g/j) et vitamine D (800 UI/j) doit être systématique sauf cas particulier, dans la mesure où l’efficacité des médicaments anti-ostéoporotiques n’a été montrée qu’en cas de normalisation du bilan phosphocalcique.

 

B Biphosphonates

Ces médicaments ont une action anti-ostéoclastiques. Plusieurs essais contrôlés ont montré leur efficacité pour augmenter la densité minérale osseuse et diminuer le risque de fracture vertébrale et non vertébrale. Ils représentent la prescription de première intention de l’ostéoporose de la personne âgée.

Ils sont contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine < 30 mL/min, voire 35 mL/min pour le zolédronate) et en cas d’hypocalcémie. Il faut leur associer une supplémentation en calcium (1 g/j). En cas de carence en vitamine D, il faut impérativement la corriger avant de les prescrire. Plusieurs molécules ont une indication dans l’ostéoporose et plusieurs modalités d’administration sont disponibles :

  • une prise hebdomadaire : alendronate 1 cp à 70 mg, risédronate 1 cp à 35 mg ;

  • une prise mensuelle : risédronate 2 cp à 75 mg (2 jours consécutifs) ;

  • une prise annuelle : zolédronate 4 mg en perfusion veineuse d’au moins 20 minutes.

Les effets secondaires et leur prévention sont les suivants :

  • toxicité digestive potentielle par contact direct avec la muqueuse : les biphosphonates par voie orale doivent être pris à jeun et en position assise avec 1 grand verre d’eau, en conseillant au patient de rester assis ou debout après la prise ;

  • syndrome pseudo-grippal (fièvre, courbatures, maux de tête) pour la forme en perfusion veineuse, essentiellement lors de la première administration et qui peut être prévenue par le paracétamol ;

  • ostéonécrose de la mâchoire : bien qu’exceptionnelle, cette complication est grave. Cela conduit les prescripteurs à demander un avis auprès d’un dentiste avant une prescription de biphosphonates. Si des avulsions dentaires sont nécessaires, il faut reporter le début du traitement après la cicatrisation ;

  • Dans ce cas, les biphosphonates doivent être arrêtés.

L’alendronate et le résidronate sont indiqués dans la prévention de l’ostéoporose induite par les corticoïdes. Ces médicaments sont remboursés en cas de fractures ostéoporotiques ou en cas de T-score inférieur à – 3 DS ou à – 2,5 DS associé à un facteur de risque de fracture (âge > 60 ans, faible indice de masse corporelle, antécédents familiaux de fracture).

 

C Modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes (SERM)

Cette classe comporte une seule molécule, le raloxifène (60 mg/j en 1 prise). Il agit en se liant aux récepteurs œstrogéniques qu’il stimule au niveau osseux et qu’il bloque au niveau de la glande mammaire. Son effet est neutre au niveau utérin. Les essais cliniques menés chez les femmes post-ménopausées ayant une ostéoporose ont montré que le raloxifène réduit le risque de fracture vertébrale et aussi le risque de cancer du sein. Le raloxifène est sans effet sur le risque de fracture périphérique (fracture du col du fémur), sur les troubles climatériques de la ménopause et augmente le risque de thrombose veineuse. Il n’est pas indiqué dans l’ostéoporose chez l’homme ni après 70 ans chez la femme, car il ne diminue pas le risque de fracture non vertébrale, du col du fémur en particulier, dont la prévalence augmente après 70 ans.

 

D Le ranélate de strontium

Le ranélate de strontium agirait en stimulant la formation osseuse et en freinant la résorption osseuse. Il réduit de 41 % l’incidence des fractures vertébrales et de 36 % l’incidence des fractures du col du fémur chez des malades de plus de 74 ans.

Les indications de ce traitement sont maintenant limitées, puisque le ranélate de strontium n’est plus indiqué qu’en seconde intention en cas d’intolérance aux biphosphonates, et n’est pas indiqué chez des sujets présentant un facteur de risque de thrombose veineuse ou cardiovasculaire, en particulier après 80 ans. Le ranélate de strontium est contre-indiqué en cas d’insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine < 30 mL/min).

Son déremboursement est à l’étude au moment de l’écriture de ce chapitre.

Le ranélate de strontium peut être exceptionnellement responsable d’un DRESS syndrome dans les 6 premières semaines après l’instauration du traitement. Ainsi, le traitement doit être immédiatement arrêté en cas d’éruption cutanée, de fièvre ou d’adénopathies.

 

E Le dénosumab

Le dénosumab est le traitement anti-ostéoporotique le plus récemment admis à remboursement dans cette indication. Il s’agit d’un anticorps anti-RANK ligand. En inhibant l’action de RANK ligand sur le récepteur RANK des ostéoclastes, ce traitement inhibe la résorption osseuse. Administré à raison d’une injection sous-cutanée de 60 mg tous les 6 mois pendant 3 ans, le dénosumab réduit de 68 % l’incidence des fractures vertébrales, de 20 % l’incidence des fractures non vertébrales et de 40 % l’incidence des fractures de hanche.

Comme les biphosphonates, le dénosumab est contre-indiqué en cas d’hypocalcémie, peut induire une ostéonécrose de la mâchoire (imposant dès lors les mêmes précautions que les biphosphonates) et exceptionnellement des fractures atypiques de hanche.

Le dénosumab se différencie des biphosphonates par le fait qu’il peut être prescrit en cas d’insuffisance rénale (clairance de créatinine ≥ 15 mL/min) sans modification de posologie.

L’étude STAND, menée à 12 mois chez des femmes ménopausées traitées préalablement par alendronate ≥ 6 mois, a montré que le désosumab augmente davantage la densité minérale osseuse que la poursuite du traitement par alendronate (70 mg/semaine).

Le dénosumab est indiqué dans le traitement de l’ostéoporose post-ménopausique chez les patientes à risque élevé de fracture, en seconde intention en relais des biphosphonates ou en cas de contre-indication aux biphosphonates (clairance de créatinine comprise en 15 et 30 mL/min).

 

F La parathormone (PTH) 1-34 ou tériparatide

Le tériparatide est un équivalent de la parathormone recombinante et agit en stimulant la formation osseuse. Elle a une action bénéfique sur l’architecture osseuse.

Le gain densitométrique est important, de l’ordre de 10 % par an au rachis. La PTH prévient les fractures vertébrales et périphériques. L’efficacité semble supérieure à celle des autres molécules (– 65 % pour les fractures vertébrales, – 53 % pour les fractures du col), mais les critères d’inclusion des patients concernés par l’étude princeps ayant validé l’efficacité de la PTH étaient différents (ostéoporose plus sévère).

Les contre-indications sont : maladie de Paget, ostéomalacie, antécédents de radiothérapie ou de tumeur osseuse, hypercalcémie, hyperparathyroïdie primitive, insuffisance rénale sévère.

Les effets secondaires sont des céphalées, des nausées, des hypotensions orthostatiques. Une hypercalcémie asymptomatique transitoire survient dans 20 % des cas dans les heures qui suivent l’injection.

Le tériparatide est administré par voie sous-cutanée (20 μg/j). La durée de traitement est, au maximum, de 18 mois. Compte tenu de son coût, il est considéré comme un traitement de seconde intention en présence d’au moins 2 fractures vertébrales. Le traitement sera relayé après 18 mois par un traitement biphosphonate en l’absence de contre-indication.

 

G Traitement hormonal substitutif de la ménopause

Le traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause diminue l’incidence des fractures vertébrales et non vertébrales chez les femmes post-ménopausées pendant le temps où il est administré. En revanche, le THS augmente le risque de thrombose veineuse, d’embolie pulmonaire et de cancer du sein. L’étude américaine WHI, qui est le premier grand essai randomisé évaluant les effets du THS a montré l’absence de prévention des événements coronaires et une augmentation du risque d’accident vasculaire cérébral et de démence. Enfin, il n’y a eu aucun effet positif concernant le risque de dépression, l’état cognitif, la qualité de vie, l’incontinence urinaire. À la suite de cette étude, le THS n’a plus été recommandé pour le traitement de l’ostéoporose. Toutefois, le THS peut être prescrit pour atténuer les bouffées de chaleur et autres symptômes du climatère chez les femmes en cours de ménopause. Dans ce cas, les femmes traitées bénéficient alors d’un traitement ayant un effet anti-ostéoporotique.

Les contre-indications absolues du TSH sont les antécédents de cancer du sein, les antécédents de maladie veineuse thrombo-emboliques, les antécédents de coronopathie ou d’accident vasculaire cérébral et les néoplasies de l’endomètre.

 

 

V Stratégie thérapeutique de l’ostéoporose primitive

 

En premier, toujours penser au calcium et vitamine D

La carence en vitamine D et le défaut d’apport en calcium sont fréquemment observés chez les sujets âgés (aussi bien chez la femme que chez l’homme). Aussi, il faut les rechercher et les corriger avant même de prescrire un autre traitement de l’ostéoporose. De plus, la correction de la carence en vitamine D diminue le risque de récurrence des chutes, ce qui contribue aussi à prévenir les fractures.

En cas de carence en vitamine D, il faut recharger le stock vitaminique en prescrivant de fortes doses de vitamine D3 : par exemple cholécalciférol 200 000 UI par semaine par voie orale pendant 3 semaines. En cas d’apports insuffisants et systématiquement chez les personnes vivant en institution ou confinées à leur domicile, il faut donner un traitement quotidien (cholécalciférol 800 UI/j) ou trimestriel (100 000 UI).

L’apport en calcium doit être de 1 200 mg/j chez la personne âgée. Pour l’atteindre il faut consommer au moins un produit laitier à chaque repas. Aussi, l’utilisation de suppléments est souvent nécessaire. Ils sont parfois mal tolérés (nausées, constipation) et causes de mauvaise observance.

 

Discuter l’indication d’un traitement de l’ostéoporose et le choisir

L’indication des autres médicaments de l’ostéoporose doit être posée en fonction de l’âge du patient, d’antécédent de fracture ostéoporotique et du degré d’ostéoporose densitométrique :

  • fracture ostéoporotique sévère (fracture vertébrale, de l’extrémité supérieure du fémur, du tibia proximal, de l’humérus, du bassin), si le T-score est ≤ – 1 (ce qui est le plus souvent le cas, et qui rend donc non indispensable la pratique d’une DXA). Ces fractures sont dites sévères car elles s’accompagnent d’une mortalité accrue, justifiant d’un traitement de manière à prévenir leur récidive. En cas de fracture de hanche, le zolédronate, qui est la seule molécule à avoir montré une réduction de mortalité, sera préféré aux autres traitements, en l’absence de contre-indication ;

  • , antécédent de fracture de l’extrémité supérieure du fémur chez la mère, ménopause avant 40 ans).

Considérant que la chute est un facteur de risque de fracture, le GRIO a proposé en 2012 d’effectuer une DXA chez les chuteurs, et de mettre en place un traitement quand le T-score ≤ – 3.

En outre, le GRIO propose de pouvoir s’aider du score FRAX établi par l’OMS qui évalue le risque absolu de fracture sévère à 10 ans. Ce score est basé sur l’âge, le sexe, le poids, la taille, les antécédents personnels de fracture et maternel de fracture de hanche, la consommation de tabac et d’alccol, la corticothérapie, la polyarthrite rhumatoïde, et le T-score de hanche lorsqu’il est disponible. Quand ce score est supérieur à un seuil dépendant de l’âge, un traitement devrait être proposé.

 

Durée du traitement

Les médicaments anti-ostéoporotiques sont habituellement prescrits pendant 3 à 5 ans (hormis pour la PTH qui est prescrite 18 mois et relayée par un biphosphonate). Le traitement est poursuivi pendant une deuxième séquence de 3 à 5 ans en cas d’antécédent de fracture sévère au début du traitement, de fracture sous traitement, de nouveaux facteurs de risque de fracture ajoutés, de diminution significative de la DMO à l’un des 2 sites (≥ 0,03 g/cm2) ou en cas de persistance d’un T-score abaissé (≤ – 3). Dans les autres cas, le traitement pourra être arrêté après une première séquence de 3 à 5 ans.

 

Ne jamais oublier les mesures générales

La suppression des facteurs de risque modifiables (alcoolisme, tabagisme) doit être expliquée et proposée au patient. L’activité physique en charge, contribue à réduire la diminution liée à l’âge de la densité osseuse et a des effets positifs sur la fonction musculaire et la mobilité. Des programmes spécifiques d’exercices physiques adaptés aux sujets ostéoporotiques ont été développés.

Chez les sujets âgés, la prévention des chutes est aussi une stratégie importante (voir item 128). Le port d’un protecteur de hanche a été proposé aux sujets âgés qui font des chutes. Ces dispositifs sont composés de coques semi-rigides appliquées en regard des trochanters grâce à un sous-vêtement spécifique. En cas de chute sur cette zone, ils amortissent et dispersent dans les parties molles l’énergie liée au choc et exercent ainsi une prévention de la fracture du col fémoral. Toutefois, leur efficacité est limitée par la mauvaise observance des patients auxquels ce dispositif est proposé.

VI Prévention de l’ostéoporose primitive

La prévention de l’ostéoporose fait appel à diverses mesures visant à corriger les facteurs de risque modifiables. Ces mesures doivent être mises en œuvre à différents moments de la vie : apports alimentaires riches en calcium et, d’une façon plus générale, alimentation équilibrée avec apports suffisants en protides, prévention ou arrêt du tabagisme et de l’alcoolisme, détection et correction des carences en vitamine D et en calcium, activité physique régulière.

Chez les femmes ayant une ménopause précoce ou chirurgicale, le THS de la ménopause doit être discuté s’il existe des troubles du climatère et en l’absence de contre-indication. Chez les patients sous corticothérapie prolongée, un traitement préventif de l’ostéoporose par biphosphonates doit être mis en œuvre.

 

 

VII Prise en charge de l’ostéoporose cortisonique

 

Les corticoïdes induisent une ostéoporose par plusieurs mécanismes :

  • dépression des ostéoblastes ;

  • stimulation des ostéoclastes par hyperparathyroïdisme secondaire ;

  • diminution de l’absorption calcique ;

  • diminution de la synthèse des dérivés actifs de la vitamine D ;

  • diminution des hormones sexuelles par freination de l’axe hypothalamo-hypophysaire.

Ils favorisent les fractures par augmentation du risque de chute secondaire à l’atteinte musculaire. Les fractures peuvent être graves, chez des patients fragilisés par la maladie qui a justifié la prescription de cortisone : un asthmatique peut aggraver son insuffisance respiratoire si des fractures de côtes l’empêchent de tousser, une patiente polyarthritique peut avoir une perte de mobilité sévère après une fracture du col.

L’importance de l’ostéoporose cortisonique dépend de la dose de corticoïdes, de la voie d’administration, de la durée du traitement et du malade (ménopause, carence calcique associée). La perte osseuse sous corticoïdes est rapide, et apparaît sur l’ostéodensitométrie, dès le 6e mois. On admet que les corticoïdes ont pratiquement toujours un effet délétère sur l’os lorsqu’ils sont prescrits à plus de 7,5 mg d’équivalent prednisone pendant plus de 6 mois. Devant un patient ayant à prendre plus de 7,5 mg/j de cortisone pendant plus de 6 mois, il faut :

  • évaluer les autres facteurs de risque d’ostéoporose et les corriger si possible ;

  • effectuer un bilan phosphocalcique, un dosage de TSH, de testostérone chez l’homme ;

  • quantifier l’ostéoporose par une densitométrie osseuse ;

  • débuter un traitement préventif associant biphosphonates et calcium-vitamine D.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

Fiche de révision ECN

Diagnostic

 

Le diagnostic d’ostéoporose peut être posé devant :

une fracture ostéoporotique ;

et/ou

La détermination de la DMO doit être largement pratiquée si on suspecte une ostéoporose. 
Elle est remboursée dans les cas suivants :

  • fracture ;

  • traitement susceptible d’induire une ostéoporose ;

  • femmes ayant un ou plusieurs facteurs de risque d’ostéoporose : antécédents de fracture du col fémoral chez un parent du premier degré, faible poids (IMC < 19), précocité de la ménopause (< 40 ans), antécédent de corticothérapie prolongée.

Le GRIO propose de rajouter les sujets âgés chuteurs.

L’OMS a fixé des seuils pour interpréter une mesure de densité minérale osseuse : ostéoporose si T-score < – 2,5 DS.

Cependant, l’indication d’un traitement anti-ostéoporotique sera basée sur l’évaluation du risque de fracture, qui tient compte de la densité osseuse mais aussi d’autres facteurs de risque.

Les facteurs de risque de l’ostéoporose sont nombreux. 
Les principaux sont :

  • sexe féminin, ménopause précoce, nulliparité ;

  • antécédents familiaux d’ostéoporose ou de fracture ostéoporotique ;

  • tabagisme, alcoolisme, faible activité physique ;

  • dénutrition, maigreur, carence en vitamine D ou C.

En cas d’ostéoporose, rechercher une étiologie :

  • immobilisation prolongée ;

  • maladies endocriniennes : hypogonadisme, hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie primaire ;

  • médicaments : corticoïdes ;

  • rhumatismes inflammatoires chroniques ;

  • intolérance au lactose.

Diagnostic différentiel avec les atteintes osseuses d’origine cancéreuse : myélome, métastases osseuses.
 

Stratégie thérapeutique
 

  • Prévention des chutes.

  • Rechercher et corriger une carence en vitamine D.

  • Assurer des apports quotidiens suffisants en calcium et en vitamine D.

  • Supprimer les facteurs de risque modifiables (tabac, alcool).

  • Si un traitement médicamenteux est indiqué en fonction de l’existence d’une fracture ostéoporotique et du résultat de la DMO et de facteurs de risque :

chez les femmes :

  • en période proche de la ménopause : plusieurs traitements sont possibles : THS si indiqué pour des troubles du climatère, raloxifène, mais aussi biphosphonates. En seconde intention PTH (si au moins deux fractures) ou dénosumab en relais des biphosphonates ;

  • après 70 ans les SERM ne sont plus utilisés ;

chez les hommes : biphosphonates :

  • le choix du type de biphosphonate est largement guidé par le rythme d’administration souhaité (hebdomadaire, mensuel, trimestriel, annuel) ;

  • le tériparatide est réservé aux ostéoporoses sévères ayant donné lieu à plusieurs fractures vertébrales ostéoporotiques.

 

Prévention de l’ostéoporose

 

Corriger les facteurs de risque modifiables tout au long de la vie.

En cas de traitement par corticoïdes (doses > 7,5 mg de cortisone) pendant une durée d’au moins 6 mois, le patient doit faire l’objet d’un traitement préventif par biphosphonates.

Les figures et les dossiers cliniques sont disponibles seulement dans le livre ou le e-book.

Pour accéder aux autres chapitres : LIEN

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